La communication pour les nuls

La France a certainement de solides enjeux et dĂ©fis Ă  relever, un des plus urgents Ă©tant sĂ»rement de comprendre que la communication n’est pas un domaine qui doit ĂȘtre traitĂ©e avec lĂ©gĂšretĂ©, voire avec inconscience. MĂȘme si l’affaire se passe en Suisse, elle est assez Ă©difiante car elle dĂ©montre les dangers d’une utilisation des ressources en ligne (de plus en plus globalisĂ©es – perte de sens par la confrontation des valeurs culturelles souvent divergentes – cf mon article sur les logos) et d’une communication irresponsable (rejet de la faute au plus bas maillon de la chaĂźne).

J’ai carrĂ©ment bondi en dĂ©couvrant hier cette triste affaire d’une publicitĂ© parue dans le cadre du festival de Montreux, mettant en scĂšne, ou plutĂŽt utilisant maladroitement, le clichĂ© du Petit GrĂ©gory, ce pauvre garçonnet assassinĂ© il y a prĂšs de 30 ans, et dont le crime n’a toujours pas Ă©tĂ© Ă©lucidĂ©. Les explications ont rapidement montrĂ© du doigt l’inexpĂ©rience d’un graphiste, qui a choisi d’utiliser l’image en ignorant tous les dĂ©tails de cette sinistre affaire et surtout l’Ă©cho encore tenace et macabre que ce visage Ă©voque pour beaucoup de nos concitoyens., ce qu’on peut comprendre au vu des Ă©lĂ©ments prĂ©cisĂ©s dans l’article du parisien.fr (d’origine Ă©trangĂšre, stagiaire, jeune).

Professionnel de la communication, je trouve que cette erreur dĂ©montre l’incompĂ©tence et le manque total de dĂ©ontologie des personnes en charge de la direction de la communication. Le graphiste, parfait bouc Ă©missaire dont l’ingĂ©nuitĂ© est le seul argument avancĂ© pour justifier cette Ă©norme bourde, n’a logiquement pas Ă  assumer la responsabilitĂ© de l’Ă©dition de son travail ; car s’il reste l’auteur de son travail (ndr : sur le coup personne ne le conteste, il n’y a plus d’Ɠuvre collective, ce concept bien pratique qui consiste souvent Ă  ce que des parasites s’associent avec beaucoup de largesse personnelle dans la production d’une Ɠuvre de l’esprit qui appartient Ă  un autre), logiquement un ou plusieurs N+1 sont censĂ©s valider ses choix avant publication. Qu’on sorte que le clichĂ© Ă©tait trop flou, situĂ© derriĂšre du texte, ou Ă  destination d’un public Ă©tranger, est proprement scandaleux, car difficilement concevable, vu la taille de l’image. Qu’on explique que le graphiste soit allĂ© sur internet faire son marchĂ© pour trouver une image « gratuite » (avec la dĂ©rive actuelle sur la question des droits d’auteur et de propriĂ©tĂ© intellectuelle, sans rappeler que l’utilisation d’une image est soumise Ă  des conditions contractuelles qu’il est professionnellement et Ă©thiquement dĂ©conseillĂ© d’ignorer), dĂ©montre qu’il y a beaucoup Ă  faire dans un contexte oĂč le pillage systĂ©matique de contenu ou de ressource devient la rĂšgle (cf mon vieil article sur une image d’un blog de cuisine, utilisĂ©e par la production d’une Ă©mission de M6 sans autorisation ni rĂ©munĂ©ration).

Avant de dire que le graphiste est le coupable, que ceux qui le recrutent fassent dĂ©jĂ  le choix de ne pas confier un boulot de ce type Ă  un stagiaire, en oubliant de rappeler leur responsabilitĂ© pleine et entiĂšre dans le travail de validation et d’Ă©dition. « La rĂ©daction en chef du journal » est pleinement fautive – se dĂ©fausser sur un gars payĂ© au lance-pierre est une belle dĂ©monstration d’inĂ©lĂ©gance et de lĂąchetĂ©.

Les parents de GrĂ©gory Villement, dĂ©jĂ  durement Ă©prouvĂ©s depuis quelques dĂ©cennies, ont annoncĂ© leur dĂ©sir d’agir en justice, ce qui est nettement comprĂ©hensible ; s’ils ne le faisaient pas, ils prendraient peut-ĂȘtre le risque de voir ce type d’accident se rĂ©pĂ©ter.

Tout ça pour la promotion d’une garderie… Ubuesque ?

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