Je suis fan de Mark Millar depuis ses frasques scĂ©naristiques au dĂ©but des annĂ©es 2000… Je le qualifie souvent d’iconoclaste, car c’est pour moi l’un des premiers Ă avoir « cassé » l’image nette et respectable de certains superhĂ©ros, en allant jusqu’Ă mettre en scĂšne leur mort dans des conditions souvent choquantes. AprĂšs, avec le temps, certaines choses sont devenues un peu des gimmicks scĂ©naristiques, comme par exemple sa propension Ă dĂ©peindre des gĂ©nies comme des intellectuels dotĂ©s d’une sorte de prĂ©cognition logique. DerriĂšre cet assemblage (…blague ?) fumeux, je veux dire qu’il part du principe que par pur raisonnement logique, on peut aller jusqu’Ă anticiper des actions complexes, notamment concernant le comportement d’autrui (gĂ©nĂ©ralement, le gĂ©nie en question retourne psychologiquement un personnage moins intelligent en quelques mots bien sentis). Mais lire du Mark Millar, c’est se prĂ©parer, avec dĂ©lice, Ă l’imprĂ©visible et au sensationnel. Sur ce blog, il y a quelques annĂ©es, j’avais ainsi donnĂ© mon avis sur Old Man Logan oĂč dĂ©jĂ je vantais l’iconoclastie de Mark Millar (bien avant le Logan de James Mangold)… AprĂšs il y a eu Redson, les productions cinĂ© originales (Kingsman), enfin Mark Millar a surfĂ© intelligemment sur l’adhĂ©sion du grand public Ă un genre qui Ă©tait, quand j’Ă©tais gosse, comme beaucoup d’autres choses (le manga, le jeu vidĂ©o), rĂ©servĂ©es Ă des grands enfants soupçonnĂ©s d’immaturitĂ© chronique. J’ai acceptĂ© depuis longtemps ce terrible fardeau.
Quand Jupiter’s Legacy est sorti, je me le suis donc procurĂ©, et j’ai guettĂ© la suite car le cliffhanger du premier tome Ă©tait juste parfait. Puis j’adore le style d’une sobriĂ©tĂ© pleine de sens de Frank Quitely, ce qui fait de ce comics un vĂ©ritable plaisir total. Venant de dĂ©couvrir l’adaptation Ă venir le 7 mai sur Netflix, je n’ai pas pu m’empĂȘcher de venir taper ce petit billet avant de me mettre au boulot (deux pages de storyboard, 4 de dialogues pour aujourd’hui…) et j’attends donc avec impatience le 7 mai pour me bingwatcher la sĂ©rie (avec le plaisir coupable de pouvoir comparer avec la BD – dĂ©jĂ spoilĂ© mais avec le plaisir de pouvoir conseiller mes proches mdr).
Comme par hasard (humour), sur Prime, j’ai dĂ©couvert Invincible, une sĂ©rie animĂ©e adaptĂ©e d’un comics de Kirkman, le scĂ©nariste de The Walking Dead. J’ai un avis assez partagĂ© sur Kirkman car j’aime ce qu’il fait (des dialogues savoureux, des personnages profonds et complexes, des situations dĂ©stabilisantes, une noirceur oĂč brille toujours une faible lueur d’espoir) tout en voyant les influences, voire des inspirations dĂ©rangeantes (le dĂ©but de The Walking Dead c’est juste la repompe de 28 jours plus tard de Danny Boyle). J’ai arrĂȘtĂ© the Walking Dead au volume 20 (avec Negan qui explose littĂ©ralement un des protagonistes principaux – trop nihiliste pour moi), surtout Ă cause d’une lassitude des longs couloirs de dialogues que je trouvais Ă la fin irrĂ©alistes, voire surrĂ©alistes. Je suis un bavard, un hableur, et je suis un de ces personnages improbables qui te sort un discours interminable nĂ©cessitant une capacitĂ© d’attention et d’adhĂ©sion que je n’ai rencontrĂ©, Ă vrai dire, que chez mes hamsters nains (mais il n’est pas impossible que ces petits malins me dupent). Invincible, je ne l’ai donc pas lu parce que pas vraiment saisi par le gĂ©nie de Kirkman. Mais quand une adaptation a pointĂ© le bout de son nez sur Prime VidĂ©o il y a deux semaines, je n’ai pas ergotĂ© et j’ai dĂ©couvert le bidule. Enthousiasmant, mais diantre, que ça me fait penser Ă du Millar, avec le mĂȘme mĂ©canisme d’installation puis de destruction amenant rĂ©ellement l’intrigue Ă venir. La sortie des ces deux productions (le mot actuel serait plutĂŽt « contenu » – voire mon billet prĂ©cĂ©dent sur le sacrĂ© :-p) est peut-ĂȘtre l’introduction d’un nouvel Ă©pisode dans la mode des superhĂ©ros, aprĂšs les versions pulp et populaires de Marvel, voici venir l’iconoclastie et l’irrĂ©vĂ©rence que le succĂšs de la sĂ©rie « The Boys » sur Prime a clairement initiĂ©/encouragĂ©/stimulĂ©.
Au dĂ©but du teaser on voit la fameuse Ăźle, et c’est juste ça que j’avais regrettĂ© dans le comics initial… il y avait comme un parfum du Planetary de Warren Ellis et Cassaday (un de mes prĂ©fĂ©rĂ©s), mais ça ne reste qu’au stade de la fragrance (j’avais Ă©crit d’abord Ă©crit « flagrance », lapsus sĂ©mantique ?), lĂ oĂč j’aurais bien fait bombance (la rime est offerte par la maison).